Guignol's
Band

Ed. Denoël, 1944

Guignol's Band, troisième roman de Céline, occupe une place particulière dans le corpus romanesque. En projet depuis 1936 (après Mort à crédit), la première partie est publiée en avril 1944, à l'approche de la libération. Cette publication s'effectue dans l'urgence, comme le révèle Céline dans la préface :

Ed. du Livre de Poche, 1969" Lecteurs amis, moins amis, ennemis, Critiques ! me voilà encore des histoires avec ce Guignol's livre I ! Ne me jugez point de sitôt ! Attendez un petit peu la suite ! le livre II ! le livre III ! tout s'éclaire ! se développe, s'arrange ! Il vous manque tel quel les 3/4 ! Est-ce une façon ? Il a fallu imprimer vite because les circonstances si graves qu'on ne sait ni qui vit ni qui meurt ! Denoël ? vous ? moi ?... J'étais parti pour 1200 pages ! Rendez-vous compte ! "

Le contexte historique n'est effectivement pas favorable à l'écrivain, qui redoute certaines représailles à cause des pamphlets. Alors que le livre sort en librairie, Céline travaille déjà la suite et, lors de son départ pour le Danemark au mois de juin, il confie la seconde partie dactylographiée mais non corrigée à Marie Canavaggia. De son côté, il emporte un exemplaire afin de procéder aux ultimes retouches. Il abandonnera pourtant ce projet au profit de Féerie pour une autre fois.

Effectivement, ce roman est court. L'édition originale comporte 348 pages au format 19x12 cm. Rien de commun avec les deux premiers romans... La particularité de Guignol's réside dans le renouveau du style. Les pamphlets ont permis à Céline de toucher à un nouvel exercice littéraire et cela influence considérablement l'écriture de Guignol's, dans lequel la construction classique des phrases est rejetée de manière absolue. Il innove véritablement dans le renouveau du langage. Guignol's Band est aussi le roman de Céline sans doute le plus drôle... Ed. Folio, 1987

Le récit se déroule à Londres, entre 1915 et 1916. Ferdinand, réformé, fréquente la pègre et particulièrement Cascade, un maquereau français. Le roman expose les rivalités entre prostituées et souteneurs. Il dévoile également un personnage très célinien, Sosthène de Rodiencourt, illuminé mystique, qui n'est pas sans rappeler le Courtial de Mort à crédit...

" Braoum ! Vraoum !... C'est le grand décombre !... Toute la rue qui s'effondre au bord de l'eau !... C'est Orléans qui s'écroule et le tonnerre au Grand Café !... Un guéridon vogue et fend l'air !... Oiseau de marbre !... virevolte, crève la fenêtre en face à mille éclats !... Tout un mobilier qui bascule, jaillit des croisées, s'éparpille en pluie de feu !... Le fier pont, douze arches, titube, culbute, au limon d'un seul coup ! La boue du fleuve tout éclabousse !... brasse, gadouille la cohue qui hurle étouffe déborde au parapet !... Ça va très mal... "

 

- Résumé - Critiques -