Bloc-notes,
Décembre 2006
Dans
un livre sur Céline, François Marchetti s’est vu qualifier d’« étape
obligée des céliniens à Copenhague » ¹. Et les auteurs
d’un autre ouvrage – que nous avons défini ici comme une « encyclopédie
de l’exil danois » ² – lui
ont exprimé leur gratitude pour avoir été leur guide à Korsør.
Rien d’étonnant à cela : François Marchetti est sans nul
doute celui qui sait
le mieux ce que furent les années danoises de Céline. Dès
1969, il a rencontré différents témoins de première main avec lesquels
il s’est longuement entretenu et qui lui ont beaucoup appris sur la vie
de Céline au Danemark
³. En premier lieu, Helga Pedersen, ministre de la Justice de 1950 à
1953, dont il traduisit le
livre Le Danemark
a-t-il sauvé Céline ? Plus
récemment, il a traduit les souvenirs d’Ole Vinding,
ainsi que ceux de
Bente Karild qui fréquentèrent l’écrivain exilé.
Depuis plusieurs décennies, François Marchetti s’efforce de réhabiliter
aux yeux du public danois l’image de Céline, perçu essentiellement
comme écrivain antisémite et parangon de l’ingratitude. De même, il
n’a jamais cessé d’insister sur le rôle déterminant qu’ont joué
plusieurs personnalités danoises influentes – Thorvald Mikkelsen, Per
Federspiel, Aage Seidenfaden,
Herman Dedichen et Hartvig
Frisch – pour s’opposer à l’extradition de Céline vers la France,
où, dans le climat vengeur de l’immédiate après-guerre, l’attendait
un jugement dont l’issue ne faisait guère de doute.
Né en 1936, François Marchetti s’est fixé au Danemark en 1965 avec
son épouse, l’artiste-peintre Geneviève Villa. Professeur à l’Université
de Copenhague, ce lexicographe réputé a traduit près de 10.000 pages du
danois en français et a signé de très nombreux articles, dont plusieurs
ont paru dans ce Bulletin. Dans ce numéro, il salue la mémoire de Else
Jensen et de Svend Mogensen qui viennent de disparaître.
Membre de la Société danoise des Gens de lettres, François Marchetti
s’est remarquablement intégré à son pays d’accueil dont il aime la
culture et le peuple. En septembre dernier, quatre quotidiens nationaux
danois et le journal local de Korsør ont salué son 70e
anniversaire et n’ont pas manqué de souligner son rôle de « passeur »
culturel entre la France et le Danemark.
Il est bien naturel que ce Bulletin rende à son tour hommage à ce célinien
émérite qui n’a jamais ménagé son aide à ceux qui voulurent traiter
de Céline en exil. Pour
conclure, je m’en voudrais de ne pas saluer les qualités humaines de
cet homme discret. Affable
et chaleureux, cet érudit, amateur éclairé de théâtre, de cinéma et
de photographie, a su rester modeste.
Aussi sera-t-il
le seul à s’étonner
que nous lui consacrions un numéro spécial. Que son épouse Geneviève
et ses filles, Ariane et Agnès, soient vivement remerciées pour leur
appui dans cette amicale conspiration.
M.
L.
1. Philippe
Alméras, Dictionnaire Céline. Une œuvre, une vie,
Plon, 2004.
2. Éric Mazet & Pierre Pécastaing, Images d’exil.
Louis-Ferdinand Céline, 1945-1951 (Copenhague-Korsør), Du Lérot
& La Sirène, 2004. Rendant compte de ce livre, un célinien a même
écrit qu’on pouvait considérer que cet ouvrage avait été écrit
« à trois, l’apport de François Marchetti » (…)
étant « loin d’être négligeable » (Études céliniennes,
n° 2, automne 2006, p. 54)
3. Outre ceux cités
ci-dessus, mentionnons le couple de régisseurs de Klarskovgaard, Richard
et Marie Petersen, leur fille Erna Rasmussen, le libraire de Korsør
Mogens Zachariassen,...
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