Le centenaire d’Eugène Dabit

 

On connaît plus Hôtel du Nord, le film de Carné, que L’Hôtel du Nord de Dabit, un roman de 1929 qui l’a inspiré.

 

    Le 21 septembre 1898 naissait Dabit. Aucune célébration n’a marqué ce centenaire. Pour L’Hôtel du Nord, en 1931 Dabit avait reçu le prix populiste. Il est l’un de ceux qui ont le mieux rendu l’atmosphère du Paname des trente premières années du siècle. " Je suis né à Paris. Aussi loin que je remonte dans mon passé, je retrouve l’image de maisons charbonneuses... " Ainsi débute Faubourgs de Paris ¹.
    En 1923, les parents de Dabit achètent l’Hôtel du Nord, 102, quai de Jemmapes.
    " Le destin m’a longtemps fait vivre et travailler à l’Hôtel du Nord. J’y ai vu arriver un à un les personnages de mon livre, je les ai vus partir, et plus jamais ne les ai rencontrés. ", explique Dabit dans Ville Lumière ².
    Si Carco est le héraut du Paris voyou, Dabit représente le Paname ouvrier. Un même monde à deux têtes, le couple Jouvet-Arletty – lui, souteneur, elle, prostituée – le prouve bien, dans le film. Au comptoir, de l’Hôtel du Nord, Andrex, petit ouvrier, s’oppose à Jouvet, alias M. Edmond : " Restez dans votre milieu, monsieur Edmond, vous mêlez pas au nôtre." Certes, mais Jouvet et Arletty crèchent à l’Hôtel du Nord où, se réjouit Dabit, " je ne suis plus en présence d’intellectuels, d’artistes, ou de bourgeois. J’entends raconter d’autres histoires, qui ne sont jamais gratuites, curieuses, littéraires, et je retrouve la vie, nue. "
    Encore qu’en lisant son Journal intime ³, ses éloges sur Céline, je suppute que Dabit aurait évolué, l’homme avait des convictions : " Entre fascisme et communisme, je n’hésite pas, j’ai choisi le communisme ", note-t-il, le 25 juillet 1936. Le 21 août, à Sébastopol, une scarlatine toxique emporte Dabit, il avait trente-huit ans. Rentré d’URSS fin octobre 1936, Céline écrit à sa veuve : " J’ai bien pensé à venir vous voir et les pauvres parents ! (...) Je passerai sûrement déjeuner dans les premiers jours de la semaine prochaine 4. " En avril 1933, Dabit le consigne : Céline a mis les pieds à l’Hôtel du Nord.

Claude DUBOIS

1. Editions Le Dilettante
2. Idem
3. Ed. Gallimard
4. L.-F. Céline. Douze lettres à Eugène Dabit, Ed. Le Lérot
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