Le questionnaire Sandfort
" Pour la première fois on a retrouvé
une correspondance entre Céline et son traducteur contenant, en plus des lettres, tout un
questionnaire sur des problèmes de traduction. Il y avait, en effet, dans les archives de
J.A. Sandfort, avec les neuf lettres de Céline, trente-trois pages contenant les
questions que Sandfort a posées à Céline afin d'éclairer sa compréhension du texte [Voyage
au bout de la nuit]. Ces feuilles, prises dans un simple cahier décolier, nous
présentent un singulier contraste entre l'écriture fine et appliquée du Néerlandais et
celle de Céline.
C'est Sandfort lui-même qui a numéroté soigneusement en haut et
à gauche les pages de 1 à 33. En haut à droite on peut lire les numérotations des
envois successifs : trois fois cinq pages, deux fois huit et deux pages non numérotées.
Chaque page contient entre deux et quatre questions, séparées
par l'espace où Céline était invité à écrire sa réponse ; celle-ci se compose
souvent d'un " oui " bref, moins souvent d'un
" non " souligné, suivi de la signification correcte. Quelquefois
Céline rature une des réponses proposées par son correspondant, souvent il désigne à
l'aide d'une flèche la solution à retenir. Cette façon très lapidaire de répondre
semble agacer Sandfort (page 25). "
Michel Uyen et Peter Altena
Page 13 du questionnaire :
(les réponses de Céline figurent en gras)
p. 183, l. 6 : ni les chefs de bataillon ne se fatiguent aisément de traquer leurs proies maigres, transies à belotter entre les lits pisseux. Belotter s.v.p.
jouer à la belote (cartes)
p. 184, dernière ligne : le blanc lui s'empoisonne, cloisonné qu'il est
entre son jus acide et sa chemise en cellular.
Chemise en filet peut-être ?
en filet
p. 187, l. 16, d'en bas : L'embouchure d'un grand fleuve sablonneux, le
men, m'expliqua-t-on, par où je devais remonter pour atteindre, en barque, le beau
milieu de la forêt.
Le mot "men" je le cherche en vain.
erreur typo le mien
Page 25 du questionnaire :
(les réponses de Céline figurent en gras)
p. 397, l. 14 d'en bas: Savez-vous ce qu'il m'a proposé d'abord ? De vous
faire la peau à vous ma fille.
Faire la peau écorcher ? assassiner ?
oui
p. 436, l. 16 : Le feu en train, c'est le cas de le dire envers
et contre tout.
Je ne comprends rien à cette proposition. Y parlez-vous toujours de Napoléon ? Si
c'était le cas, cela me rendrait les mots soulignés quelque peu intelligibles, mais
toujours pas le reste de la phrase. C'est pour cela que je vous prie de bien vouloir me
paraphraser la proposition entière, si cela n'entrave pas votre trop belle habitude de
briller dans le bref en matière d'explications.
le feu au derrière, l'ardeur
au derrière, le cul ardent
Page 26 du questionnaire :
(les réponses de Céline figurent en gras)
p. 436, l. 17 d'en bas : Bistoquette !
Je cherche le mot en vain. Serait-il par hasard un nom propre ?
Verge, penis
p. 437, l. 2 d'en bas : ... quand dans chacune de vos secondes s'écrase
un désir de mille autres choses et d'ailleurs.
Et d'ailleurs et plus ? ou est-ce que cela se rattache plus directement à "un
désir", ainsi : un désir d'ailleurs un désir d'être ailleurs ?
les deux baudelairiens
p. 445, l. 15 d'en bas : Ils n'en avaient plus qu'ils en avaient
encore les clients d'amour à partager, autant que ceux de Madame Hérote.
Le souligné ne m'est pas très claire, bien que je sente que le tout veut dire : Ils en
avaient beaucoup.
"Y en a plus qu'il y en a encore", formule
populaire exprime l'abondance infinie