Dans une de ses chroniques littéraires, Robert Poulet (1893-1989) a évoqué les lettres qu'il avait reçues de Céline, soit "une cinquantaine de billets". Triant cette correspondance, il n'avait pas retrouvé la lettre où l'auteur de Normance expliquait longuement l'importance de cet ouvrage à " Walther Orlando ", dont il ignorait l'identité. C'était le pseudonyme que François Mauriac avait prié Robert Poulet de prendre pour pouvoir collaborer à la revue La Table ronde, qu'il dirigeait. Il ne fallait pas qu'on sût que les chroniques sur Céline, Giono, Jouhandeau, Chardonne, etc., étaient l'œuvre d'un ancien condamné à mort.

Robert Poulet se souvenait (Robert Poulet. "Rêverie sur une correspondance", Rivarol, 22 juillet 1982) : " Walther Orlando avait peu prisé Féerie pour une autre fois et Normance, qu'il attribuait au "génie célinien tournant à vide" ; et, dans ces réserves, le romancier, récemment revenu en France, n'avait pas reconnu ma voix. Il est vrai que nous ne nous étions pas revus depuis nos rencontres chez Denoël, treize ans auparavant.

Je regrette bien d'avoir égaré ces pages, qui développaient le thème suivant : "Maintenant que le cinéma existe, on ne peut plus raconter d'histoires imaginaires. On ne peut plus que communiquer au lecteur une certaine vibration. " Ma réponse fit seulement pousser à mon ami Louis quelques clameurs d'étonnement, avec force points de suspension. Cependant, je ne fus invité à Meudon que quand j'eus exprimé la vive et joyeuse admiration que m'inspirait D'un château l'autre. La suite ne regarde que lui et moi, jusqu'au dernier signe d'amitié, quelques semaines avant le 1^er juillet 1961."