Céline musicien, de Michael Donley
Le livre de Michael Donley est sans doute l'un des plus importants qui aient été écrits ces dernières années sur Céline. C'est certainement parce qu'il est lui-même musicologue que Donley a été très tôt sensible à la "petite musique" de Céline. Certes, on n'ignore plus aujourd'hui la façon hautement poétique dont l'écrivain a su maîtriser les aspects sonores et rythmiques du français en général, et du français parlé, en particulier. Mais Donley montre excellemment que, pour Céline, le mot "musique" ne désigne pas seulement le style, mais aussi tout ce qu'il essaie de capter : la musique intérieure, c'est-à-dire la musique de l'âme. Dans un livre qui fera date, Michael Donley nous donne à voir que la petite musique célinienne loin d'être un maniérisme syntaxique n'est autre que la mise à jour du véritable contenu de ses livres : la musique de vie. Dans cette introduction, l'auteur nous explique en quoi Céline a voulu "donner prime à la musique".
D'instinct, et de façon répétée tout au long de sa carrière, lorsqu'il s'agit de résumer l'essence de son art, Céline reprend le terme de musique. Ce trait est bien connu; de fait, l'expression "petite musique", comme tant de ses créations linguistiques, est entrée dans le vocabulaire courant 1. Cependant, les raisons précises pour lesquelles il a eu si souvent recours à cette métaphore n'ont jamais été convenablement examinées ou explicitées. Les études menées sur cette question, toutes de peu d'ampleur, se sont limitées à l'une ou plusieurs des quatre approches suivantes : le simple relevé dans ces textes de références superficielles à la musique; une compréhension réduite de la musique en tant que métaphore de la structure des textes ; une analyse linguistique de l'usage que fait l'auteur du français parlé ; ou enfin l'examen de certains aspects sonores et rythmiques de son style.
Nombreuses sont en effet les mentions explicites de certaines chansons, opérettes, instruments ou interprètes ; mais en s'y attardant on n'irait guère au-delà de la surface. Au mieux, une telle approche ne sert qu'à rappeler à ces critiques que Céline nommait lui-même " les "existenglaireux" [... ] [qui] me foutent tout en glaires !... " (Féerie II, p. 314), la seule fréquence indéniable de ces références 2.
Un exemple de la deuxième approche est fourni par Pol Vandromme qui, dans une étude de 1963 par ailleurs perspicace, en reste au niveau du thème et des variations 3. Une appréciation similaire apparaissait déjà dans la recension du Voyage parue dans la N.R.F. en 1932 : "Une uvre que l'on pourrait dire musicale, dont les thèmes vivent, se succèdent, se développent, s'effacent pour reprendre, sans que jamais soit rompue l'harmonie haletante de l'ensemble " 4. De fait, l'auteur lui même, dans l'une de ses premières lettres à Gallimard (dans laquelle il donne un résumé du manuscrit soumis) utilise l'expression de "symphonie littéraire" 5.
De telles approches contiennent une part de vérité, mais c'est une vérité banale. Dans le cas de Céline, elles ont bien pu avoir leur utilité par le passé, en aidant à établir sa réputation de styliste réfléchi dont les livres, en dépit des apparences, sont soigneusement organisés. Néanmoins, elles n'apportent qu'un début d'éclaircissement à ce qui est contenu dans l'expression, à la simplicité trompeuse, de " petite musique ".
Quant à l'approche linguistique, elle tend à concentrer son analyse sur les voies par lesquelles Céline est parvenu à remodeler la prose française de façon à y injecter ce qu'il décrivait comme "l'émotion du langage parlé" (Entretiens avec le professeur Y, p. 448). Sa réussite fut aussi complexe que celle du "folklore imaginé" de Bartók, ce dont il avait pleinement conscience "Enfin Céline vint ! ", s'enorgueille-t-il (Entretiens avec le professeur Y, p. 533). Mais ce troisième type d'étude, valide dans son propre domaine, ne fait toujours pas justice à la métaphore musicale 6.
La quatrième approche, qui se trouve en pratique combinée avec l'une des trois autres, revêt une importance supérieure. L'accent y est mis sur la musique en tant que timbre, sonorité, sur la façon dont sonnent les mots, et partant les rythmes qu'ils créent. Ainsi, la musique n'apparaît que comme "la mise en forme d'une matière sonore" 7. Il faut admettre que telle est bien la signification du mot lorsque le narrateur de Mort à crédit l'utilise à propos de ses insomnies et ses bourdonnements d'oreilles : "Ma grande rivale c'est la musique" (Mort à crédit, p. 536), ou lorsque les bombardements sont décrits comme "la musique du grand carnage" (Guignol's band I, p. 90). C'est également le sens auquel il pense lorsqu'il se présente dans Féerie pour une autre fois I, " composant mes musiques pour livres " (Féérie I, p. 86), ou lorsqu'il assimile la "musique" à une "richesse verbale", dans une lettre écrite à la même époque 8. Et c'est encore à cela qu'il fait allusion dans un entretien donné un an avant sa mort, en parlant de "la force des mots, leur musique" 9. Sa sensibilité envers cet aspect apparaît aussi dans une allusion au suédois comme "le côté poisson du langage" (Guignol's band II, p. 674) ou l'anglais comme "un français mal prononcé" 10.
Certainement, ce phénomène doit tenir une large part dans toute appréciation des pouvoirs stylistiques de Céline. Il revient lui-même sur ce point à de nombreuses reprises dans sa correspondance avec Albert Paraz. Exilé au Danemark et malheureux d'être coupé du son de sa chère langue maternelle, il décrit la difficulté d'une telle situation pour quelqu'un qui est, comme lui, "[un] musicien du français" 11. Quelques mois auparavant, il avait écrit dans une veine plus explicative : "Je suis descendu à Sigmaringen par patriotisme 12 pour entendre parler le français, parce que je suis un musicien créateur de la langue française, et que loin du "parler français" je meurs "13. Qu'il ne s'agisse pas là d'une excuse forgée pour des seuls motifs politiques, on s'en persuadera en notant que, plus d'une décennie auparavant et alors qu'il était au sommet de sa gloire, il avait déjà exprimé le même souci à un autre correspondant, peu avant de s'embarquer pour l'étranger : "J'emmène cette amie pour parler français le long du chemin. Je perds ma musique de phrases à l'étranger" 14. Lorsqu'il parvient en 1951 à revenir de l'exil, l'une de ses premières lettres exprime son soulagement dans des termes identiques : " La langue française retrouvée ma musique !" 15.
Cette compréhension de la musique comme sonorité et rythme se retrouve dans les textes et la correspondance de Céline du début à la fin de sa carrière. Alors que Voyage partait à l'imprimeur en août 1932, nous le voyons écrire à son éditeur : "De grâce surtout n'ajoutez pas une syllabe au texte sans me prévenir. Vous foutriez le rythme * par terre comme rien " 16. Et dans les pages finales de son dernier livre, Rigodon, qui fut achevé quelques heures avant sa mort, un souci identique apparaît : "... Il faut se méfier des correcteurs, ils ont n'est-ce pas le "solide bon sens" ... le solide "bon sens", mort du rythme !... " (Rigodon, p. 925).
C'est précisément dans la mesure où ce motif occupe une position centrale dans son projet d'écrivain que les textes de Céline des poèmes en prose "avant la lettre" sont si difficiles à rendre en traductions 17. Sa supplique à John Marks premier traducteur de Voyage est significative par ses insistances ; on ne saurait pourtant en vouloir à Marks de n'avoir su se montrer à la hauteur des espérances de Céline : "Tout cela est danse et musique... tâchez de vous porter dans le rythme toujours dansant du texte" 18. En fait, Céline qui en ceci était aussi sévère que Du Bellay ne se faisait aucune illusion quant aux traductions : en regard de la "création vivante" originale, ce sont " forcément des choses mortes !! * " 19. Inversement, à chaque fois que des influences d'écrivains anglais ou américains sur l'auteur ont été avancées, ses réponses négatives insistaient sur l'idée que chaque langue possède sa propre musique. Exemplaire est la rebuffade qu'essuya Maurice Lemaître : " Vous pêlemélotez toutes les langues c'est-à-dire les musiques . Et c'est la musique je pense l'essentiel " 20.
Céline reprend ce thème maintes et maintes fois dans sa correspondance. Dans l'une de ses lettres de 1947 à Hindus, il explique qu' " il faut tordre la langue en tout rythme cadence mots [...] " 21. Un mois plus tard, il utilise le vocabulaire de la palpitation rythmique pour exprimer la même idée : " Resensibiliser la langue, qu'elle palpite plus qu'elle ne raisonne TEL FUT MON BUT * " 22. En 1948, il écrit à un autre correspondant en toute humilité : "La nature m'a doté d'un certain sens du rythme, d'une imagination pseudo-musicale" 23. Vers cette époque, alors que Céline était exilé au Danemark, Pierre Monnier essayait de republier Voyage. Les lettres de Céline révèlent plus que jamais une attention aiguë aux détails. Le volume dans lequel Monnier les publia par la suite fut intitulé Ferdinand furieux. L'une des choses qui le mettait ainsi en rage était le "sabotage de virgules" dont il soupçonnait son futur éditeur d'entretenir le projet 24. Car, ainsi qu'il l'avait écrit en 1936, au moment de l'impression de Mort à crédit, " La moindre virgule me passionne* " 25. De fait, la ponctuation en général chez Céline a moins à voir avec la logique grammaticale (le "solide bon sens") qu'avec le rythme et l'intonation.
La même année (1949), Céline écrivit à Jean Paulhan dans son vocabulaire habituel : "Tout mon travail a été précisément d'essayer de rendre la prose française plus sensible [...] en lui injectant un langage parlé, son rythme, sa sorte de poésie et de tendresse malgré tout [ ... ] " 26. Peu après la même année, il reprenait une idée semblable dans une lettre à Paraz, expliquant qu'il voulait forger "un langage rythmé interne" 27, accentuant le fait que " le rythme " et " la cadence [ ... ] sont TOUT" 28. "Il aimait le music-hall, nous allions tout le temps au music-hall" : les souvenirs d'Elizabeth Craig 29 viennent confirmer cette influence du music-hall dont Céline fit l'aveu à Paraz, soucieux toutefois d'ajouter : "Pas dans les babillages dans le rythme, la cadence [ ... ] " 30.
On a décrit plus haut les textes de Céline comme des poèmes en prose, mais il était lui-même le premier à faire cette comparaison. Écrivant à son ami le Dr Camus, en 1950, il parle de "cette espèce de prose versifiée qui est mon genre", ajoutant que c'est "aussi fastidieux que la composition MUSICALE " 31. Cette mention de la "prose versifiée" rappelle ce passage des conversations de Céline avec Robert Poulet (1957) dans lequel il se fait encore plus explicite :
En réalité je n'aimais que les poètes. Les vers, ça me frappe, ça me touche, ça m'impose. Je les tourne et les retourne dans ma tête, pour voir comment ils sont faits; comme on examine le mécanisme d'une montre. Ces contraintes mystérieuses, compter les syllabes, chercher des rimes, accueillir des images; cette forme sévère, pareille à celle qui enferme les objets... Les vers ce sont des bijoux bien ciselés et bien astiqués 32.
Le témoignage de Marie Canavaggia (la secrétaire et correctrice des épreuves de Céline) peut confirmer ces remarques. Intimement liée (de 1936 à sa mort en 1961) au processus de mise en livre de son travail, elle nous apporte des souvenirs dont on ne saurait exagérer l'importance :
S'il décidait de changer un mot, il ne se contentait jamais de le remplacer par un autre. Il recomposait entièrement sa phrase, parfois même aussi les phrases environnantes, selon les exigences de sa "cadence". Quelquefois en pianotant comme s'il avait compté les pieds d'un alexandrin 33.
Une telle attention au contexte rythmique le plus large, c'est ce que Céline indique lui-même dans une autre lettre à Paraz. Minimisant la valeur des dictionnaires d'argot, il écrit que "les mots ne sont rien s'ils ne sont pas notes d'une musique du tronc. [ ... ] La magie n'est pas dans les mots, elle est dans leur juste touche ainsi du piano des airs, du Chopin des notes " 22.
Canavaggia souligne également l'importance qu'attachait Céline, dans ce processus de fabrication, à la lecture de son texte à haute voix c'est-à-dire, à la façon qui révélerait le mieux sa musicalité. Max Dorian, racontant les journées excitantes de 1932, lorsque les épreuves de Voyage arrivaient, le confirme :
Tonitruant, postillonnant, gesticulant, rigolant, il nous lisait tout haut des passages des épreuves que nous recevions au fur et à mesure de l'imprimerie. C'est ainsi qu'il nous révéla son secret : le Voyage est prose sonore, composée pour être lue à haute voix. Mais pour arriver à ce rythme, que d'efforts, de remises en chantiers 35.
Joseph Delteil fut semblablement impressionné vers 1939. Son article de souvenirs s'intitule ainsi Céline l'oral, car, comme il l'explique, " il me semble que les livres de Céline sont essentiellement des livres parlés* " 36. À partir des enregistrements d'extraits dits par des acteurs tels qu'Arletty et Michel Simon (versions que Céline semble avoir admirées 37), il nous est encore possible d'apprécier quelque chose de ce à quoi Dorian, Delteil et les autres faisaient allusion. Dans une version préliminaire de Féerie, il insiste lui-même sur ce point: " [ ... ] Je suis de l'opérette [ ... ] j'ai [le mal de vivre] en horreur [ ...] ... Y a qu'à me lire tout haut ! je chante ! je danse ! " 38.
L'année même (1950) où Céline écrivait au Dr Camus en mentionnant sa "composition musicale", Morvan Lebesque fit paraître une critique de Casse-pipe (le manuscrit incomplet des années 30 qui venait alors d'être publié) dans une veine que l'auteur aurait certainement approuvée :
Mais la part de la musique est encore plus importante. La phrase de Céline, nul ne l'ignore, est essentiellement musicale [... ] et chaque alinéa de sa prose se présente comme un " morceau " très étudié, avec allegro, [... ] moderato.
Lebesque relève également " les points de suspension (points d'orgue) et les onomatopées (sons purs) ...[... ] le jeu musical et ... purement sonore* des interjections " 39.
Cependant, Céline n'avait besoin de personne pour reconnaître ses talents. Témoin ce jugement qu'il donne dans Féerie pour une autre fois I : " L'exquisité de mon écoute !... Chef d'orchestre en somme !... [...] J'ai l'oreille, voilà !!... [...] je suis un homme d'oreille " (Féerie I, p. 97) 40.
Pour important qu'il soit, il nous faudra dépasser ce type de compréhension de la musique chez Céline ; toutefois un dernier aspect mérite d'être souligné. Il semblerait que l'oreille exercée de Céline ait contribué pour une large part à stimuler sa créativité, provoquant certaines de ses " trouvailles " les plus caractéristiques. Le " jeu sonore " auquel Lebesque fait allusion ne se limite en aucun cas à des interjections.
Comme on pouvait s'y attendre, de nombreux exemples d'allitérations peuvent être repérés. Ainsi " le communisme joyeux du caca " (Voyage, p. 196) ; " une [...] pétaudière de publications " (ibidem, p. 285) ; " séjour pour séraphins " (Voyage, p. 382) " [l] armée tchécoslovaque, terreur des tyrans totalitaires (textuel) " (L'École des cadavres, p. 60) ; " championnes du charme " (Guignol's band I, p. 115) ; " Ah folichon fier fumier ! " (Guignol's band II, p. 662) ; " un carnaval de quincaillerie" (Guignol's band, II, p. 560) ; " focs fous " (ibidem, p. 662) ; " ma madone mutine " (ibid., p. 813) ; " menhirs mêlés [... ] mandolinant " Ministrels " [... ] mille miss en mollets " (Féerie I, p. 58) ; " cochon catastrophe crouillat " (Féerie II, p. 213) " la bamboula de bombes " (ibidem, p. 219) ; " tartuffes-tanks " (Les Beaux draps, p. 17) ; " un tintouin de tonnerre " ( ibidem, p. 95) ; " Guillotine est fille de guichet " (ibid., p. 97) ; " fric first, fils " (D'un château l'autre, p. 75) ; " [Les Roussky] tortillent du tank, dialectalotent " (ibidem, p. 111) " fille à flics " ( D'un château l'autre, p. 188) ; "sex-appeal des salles d'attente " (ibidem, p. 159) ; " le bacchanal des bombes sur Berlin " (Nord, p. 559) ; "Sargasse des souvenirs" (Rigodon, p. 192).
Toutefois, c'est à la forme plus rare de l'homéotéleute qu'il faudrait accorder davantage d'attention. L'emploi de ce type d'assonance qui joue sur le retour des finales de mots proches ou voisins (par ex. "La Bohème, ce désespoir en café crème", Voyage, p. 359) est frappant chez Céline. Comme si, pour reprendre les termes de ses remarques à Poulet, il était en train de " chercher des rimes " 41 pour " cette prose rimée " 42. Étant donné l'importance de cette habitude badine, on a jugé bon de relever une série d'homéotéleutes céliniens. On trouvera cette liste, qui ne prétend à aucune exhaustivité, dans une annexe placée à la fin de cette étude.
Ces remarques introductives nous conduisent à infirmer l'observation de Paul del Perugia, dans ce qui demeure néanmoins un livre de première importance, selon laquelle "les bruits musicaux, en général [ ... ] n'occupent que peu de place dans l'univers célinien " 43. Cependant, notre recherche de la portée exacte du concept de musique chez Céline n'a guère avancé. Assurément, Céline pensait à autre chose que la seule sonorité quand il écrivait à Paraz : "Je demeure toujours dans mes pénibles livres à un tout petit poil de la musique " 44. Dans l'un des premiers livres sur Céline, bref mais profond et poétique, Nicole Debrie remarquait à juste titre que " les affinités qui existent entre le monde de la danse et de la musique, et I'uvre de Céline sont plus profondes qu'un simple jeu d'esprit ou d'une gourmandise sensorielle " 45. La danse : nous pourrons laisser cette question de côté pour le moment dans la mesure où, en dépit de l'attention qu'on y a porté, elle n'est dans son essence qu'un concept dérivé - de la "musique en chair" comme l'écrivait Céline (Version préliminaire de Féerie pour une autre fois, p. 973). C'est alors bien à la musique proprement dite qu'on voudrait s'attacher pour tenter de dégager en quoi consistent véritablement les profondes afflinités qui la lient à l'uvre de Céline.
Michael DONLEY
Extrait de Céline musicien, Librairie Nizet, 2000, 338 pages. Prix : 190 FF.
Notes
1. " Voyage au bout de X. " " D'Un X l'autre. " De telles rubriques journalistiques, par exemple, sont devenues presquobligatoires.
2. Pour des exemples de cette approche, voir: (i) C. Nettelbeck, " Coordonnées musicales de l'esthétique romanesque de Céline ", Australian Journal ol'French Studies, XIII : 1 (1 976), pp. 80-87 ; (ii) P. Bonnefis, " Gone are the days... L'invention de la musique dans l'uvre de Céline ", Modern Language Notes, CIII (1 988), pp. 800-823. Durant la rédaction de Mort à crédit, Céline fut l'intime de la pianiste Lucienne Delforge, qui est certainement l'expert de Chopin et Haydn mentionné dans Bagatelles pour un massacre (BM, p. 358). Sa façon d'interpréter l'Étude " révolutionnaire " de Chopin a, paraît-il, aidé Céline à terminer la scène dans laquelle Ferdinand attaque son père (voir Cahiers Céline 5, p. 257). Cependant, quoique Henri Godard souligne ce témoignage dans l'édition de la Pléiade (Romans I, p. 1392), il est difficile de voir de quelle façon ces miettes d'histoire littéraire apportent quelque lumière sur ce que Céline avait en tète, en appliquant le terme de musique à tous ses livres, du premier au dernier.
3. Pol Vandromme, Céline (Paris 1963), p. 44.
4. Cité dans Romans I, p. 1256, n. 1.
5. Lettre n° 3 (14.4.32) in Lettres à la N.R.F, p. 14.
6. Parmi les exemples de cette approche : Jean Guénot, L.-F. Céline : damné par l'écriture, Paris 1973, 2ème éd. 1984 ; J. Guénot, " Voyage au bout de la parole ", L'Herne 5, pp. 246-267 ; Danièle Latin, " Voyage au bout de la nuit : de la phrase segmentée à la petite musique de Céline ", in Au bonheur des mots, Presses Universitaires de Nancy, 1984, pp. 301-8. Pour d'autres exemples, voir le " bilan " des publications sur l'auteur dressé par M. Zimmermann in Romanistische Zeitschrift für Literaturgeschichte, vol. 6 : 1982, spécialement pp. 477 - 480 (" Capturer la petite musique célinienne : approches linguistiques "). Ignoré de presque tous les céliniens, l'article (en italien) de Anita Licari intitulé " L'Effetto Céline " demeure le plus intéressant exemple de cette approche (voir Il Verri : 26, Feltrinelli, Bologna, 1968, pp. 65-79).
7. Henri Godard, Voyage au bout de la nuit de L.-F. Céline (Foliothèque, Paris 1991), p. 140. Voir aussi la Préface de Romans IV, passim.
8. Lettre à M. Canavaggia (1946), in Lettres à Marie Canavaggia, éd. J-P. Louis, Tusson, 1995, t. 1, p. 283.
9. Propos recueillis par " Aux écoutes du monde " (20 mai 1960), Cahiers Céline 7, p. 455.
10. Cahiers Céline 7, p. 440.
11. Lettre à Paraz (12.12.49), Cahiers Céline 6, p. 212.
12. Le signe * servira à indiquer les passages soulignés dans le texte original.
13. Lettre à Paraz (12.5.49), CC 6, p. 157.
14. Lettre à N... (juin 1935), CC 5, p. 130.
15. Lettres à Marie Canavaggia, tome 2, p. 419.
16. Lettre à Robert Denoël, Céline et les éditions Denoël (1932-1948), P.-E. Robert éd., Paris 1991, p. 29.
17. Il en était conscient lui-même, à en juger par les souvenirs d'Elizabeth Craig des remarques qu'il lui faisait alors qu'il écrivait Voyage : " Il traduisait les mots, interprétait les expressions idiomatiques et m'expliquait l'argot. Il le relisait de nouveau en français, me prévenait que ce serait moins bon en anglais. ", A. Juilland, Elizabeth et Louis, Paris, 1994, pp. 420- 1.
18. Lettre à J. Marks (1933), (coll. Mazet) in Tout Céline 2, p. 106.
19. Lettre à A. Paraz (24.11.49), CC 6, p. 205.
20. Lettre à M. Lemaître (1950), CC 7, p. 395.
21. Lettre datée du 16.4.1947, in Milton Hindus, Céline tel que je J'ai vu, Paris, 1969, p. 135.
22. Lettre à M. Hindus (15.5.47), op. cit., p. 138.
23. Lettre à E. Bendz (automne 1948), L'Herne 3, p. 120.
24. Lettre datée d'avril 1949, in Pierre Monnier, Ferdinand furieux, Lausanne, 1979, p. 54.
25. Lettres à Marie Canavaggia, t. 1, p. 4.
26. Lettre à Jean Paulhan (début 1949), in Lettres à la N.R.F., p. 78.
27. CC 6, p. 177.
28. Ibid., p. 205.
29. A. Juilland, op. cit., p. 376.
30. CC 6, p. 177.
31. Lettre datée du 24.5.50, in Textes et documents 3, p. 157.
32. Robert Poulet, Entretiens familiers avec L.-F. Céline, Paris, 1958, p. 68. Repris en 1971 sous le titre Mon ami Bardamu. La comparaison finale nous rappelle que l'écrivain fut apprenti deux ans et demi dans la joaillerie. (Voir Romans I, pp. LVII-LVIIII.)
33. L'Herne 3, p. 31. Pour d'autres preuves que Céline était, comme il le prétendait, " beaucoup plus poète que prosateur " ( Hindus, op. cit., p. 132 ), et que sa " prose " était vraiment " versifiée ", il est bon de se souvenir qu'il a comme pour souligner ce fait disposé une page et demi de Guignol's band l sous forme de vers (GB I, pp. 95-6). Commentant Les Beaux draps en 1944, Claude Jamet écrit : " A-t-on remarqué que Les Beaux draps sont en vers ? [ ... ] Tout le livre est bâti comme cela, sur une trame d'octonaires. " (Cf. L'Année Céline 1991, p. 92). Dans sa critique de Nord, 16 ans plus tard, André Rousseaux semble lui reprendre cette idée, en parlant de " ce propos soutenu par des rythmes où l'octosyllabe exerce sa domination musicale " (" Splendeurs et misères de Céline ", in Les critiques de notre temps et Céline, J.-P. Dauphin éd., Paris, 1976, voir p. 155.) Guido Ceronetti a même traduit des passages de Voyage en vers italiens. (Cf. L'Année Céline 1991, pp. 145-7.)
34. CC 6, p. 58.
35. L'Herne 3, p. 27. Il a conservé cette habitude jusqu'au bout, comme le confirme Vitoux dans son livre sur le chat de Céline, au sujet de la trilogie finale : "[Il] relisait à haute voix ses pages manuscrites ", Frédéric Vitoux, Bébert, Paris, 1976, p. 170.
36. Ibid., p. 41.
37. Cf. l'entretien avec Jean Guenot, " Voyage au bout de la parole ", in L'Herne 5, pp. 254-5 (également in CC 2 ; voir p. 150.)
38. Voir Romans IV, p. 1055. Les interprétations d'Arletty, de Michel Simon et de Pierre Brasseur peuvent être trouvées sur le double disque compact Anthologie Céline, réalisée par Paul Chambrillon (Frémeaux & Associés, 2000). À ce propos, on doit rappeler que Céline espérait à l'origine écrire pour le théâtre. Actuellement plusieurs jeunes acteurs, tels que Fabrice Luchini et André Dunand, obtiennent d'importants succès grâce à leurs adaptations solo de Voyage, par exemple. Cf. L'Année Céline 1990, pp. 97-101 (ainsi que les autres volumes dans cette série) pour un résumé des récentes adaptations théâtrales. Rigodon a été enregistré sur cassette (" Le Livre qui parle ") par Georges Wilson. La cassette d'une émission sur Céline de Radio-Courtoisie, diffusée le 31.10.90, contient des lectures remarquables - spécialement de Féerie 1 - par Georges Riquier.
39. Carrefour (19.9.50), cité in Romans III, pp. 893-4.
40. Cf. le second volume dans lequel il reconnaît n'être " pas sensible visuel " (Féerie II, p. 188) tout en répétant qu'il possède " l'exquisité d'écoute " (ibid., p. 249).
41. Voir note 32. Liés à ce thème, les refrains et ritournelles qui sont cités dans de nombreux ouvrages de Céline.
42. Lettre à Paul Bonny (1.10.47) in Lettres des années noires, Paris, 1994, p. 135.
43. Paul del Perugia, Céline, Paris, 1987, p. 161.
44. Cahiers Céline 6, p. 179.
45. Nicole Debrie, Louis-Ferdinand Céline, Lyon, 1961 (rééd. Paris, 1984), p. 100.